Logement et couple gay : discrimination à la location ou au crédit

Au moment de se loger, les couples homosexuels ont souvent des difficultés que n’ont pas les hétéros. Les gays se heurtent souvent à l’homophobie au moment de louer. Cette difficulté ne se retrouve pas dans le crédit immobilier, les homosexuels étant prisés par les banquiers.
À jour le 20 avril 2023

Une banque, au moment d’octroyer un crédit, à en général un raisonnement tout ce qu’il y a de plus froid, dénué de toute émotion.

Il s’agit avant tout d’évaluer le risque pour elle de prêter de l’argent.

Grâce à la méthode du crédit scoring (voir notre article), les préjugés sont en principe mis de côté.

Cette notation n’existe plus lors d’une location, sujette à des critères trop souvent purement subjectifs.

Crédit et homophobie

Soyons clairs : l’institution bancaire n’a rien de raciste ou d’homophobe. Pour une banque, seul le potentiel de gains compte. C’est ainsi que nous pouvons voir des publicités pour des produits bancaires dans les média destinés à la communauté LGBT.

Pour les prêts à taux zéro, aidés par l’Etat, pas de discrimination non plus : on ne parle même pas de couples, mais simplement du nombre de personnes destinées à occuper le logement pour faire le calcul des droits à prêt.

La discrimination bancaire se situera ainsi plutôt en agence, si par exemple le conseiller est clairement homophobe et est prêt à sacrifier une éventuelle commission plutôt que d’accorder un prêt. Ce n’est donc pas l’orientation sexuelle qui est un critère discriminant direct, mais la maladie qu’elle est supposée favoriser, comme nous allons le voir.

Crédit immobilier quand on est séropositif

L’éventualité d’une maladie est sans doute le principal critère bloquant pour obtenir un emprunt quand on est gay. Ici, ce n’est pas l’emprunt à proprement parler qui sera bloqué, mais l’assurance du prêt : la maladie provoque une augmentation du coût de l’assurance complètement rédhibitoire.

Les gays étant toujours considérés aujourd’hui comme une « population à risque », les assureurs peuvent considérer qu’ils ont plus de probabilités de contracter une maladie grave, enchérissant ainsi le coût de l’assurance. Ce n’est donc pas un blocage à l’obtention d’un crédit, mais ceci alourdit les coûts injustement, surtout lorsque le HIV est de plus en plus considéré comme étant une maladie chronique.

Il y a quelques années, un assureur proposait une offre spécifique à la communauté gay : Solidaris, du groupe April.

Lancée en juillet 2007, cette assurance de prêt a été élaborée à la demande du milieu associatif homosexuel et rend accessible la propriété à des personnes séropositives. Solidaris accepte jusqu’à 70 % des demandes d’assurance de prêt. Un taux d’acceptation d’autant plus remarquable que la société peut réagir rapidement sur la structure de l’offre en fonction notamment des avancées médicales.

Malgré toute la bonne volonté que cette offre proposait, elle liait de façon beaucoup trop marquée les homosexuels avec la séropositivité. Avec les progrès médicaux et l’ouverture progressive des assureurs aux personnes séropositives, l’offre Solidaris n’avait plus de sens, et n’existe plus.

Je pense personnellement que cette offre dédiée aux gays était un coup marketing, mais face à la polémique suscitée, n’a pas vraiment fonctionné. En France, les gays que j’ai connus voulaient surtout qu’on les laisse tranquilles, plutôt que d’être bombardées de produits marketing « faites sur mesure ». Ils veulent être considérés pour ce qu’ils sont : des êtres humains comme les autres, et éviter les clichés communautaristes.

Quoiqu’il en soit, aujourd’hui, un gay qui n’est pas malade n’a pas de difficulté particulière pour obtenir un crédit immobilier. Rien ne transparait dans les rapports de SOS Homophobie

Je cite SOS Homophobie :

La discrimination à raison de l’état de santé, notamment à raison du statut sérologique, est prohibée par l’article 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’Homme et des libertés fondamentales.

Malgré cet article, une personne malade, gay ou pas, aura beaucoup de mal à trouver une assurance de prêt à un prix raisonnable, et est comparable aux yeux de l’assureur, à une personne handicapée. Elle n’aura donc pas de refus d’assurance, mais l’assurance sera très chère.

Location et homophobie : comment louer quand on est gay ?

Sur le papier, il est interdit au bailleur de ne pas louer parce qu’une personne est gay. Mais nous savons tous qu’on évoquera d’autres raisons pour motiver le refus : pas assez de garanties, pas le bon profil… Rares sont les bailleurs qui ont été condamnés pour discrimination.

Il est donc très difficile de se loger en location si le bailleur est homophobe. La solution la plus simple : passer son chemin et trouver un bailleur plus « gay-friendly ». C’est triste à dire, mais parfois, il vaut mieux être réaliste… et résigné. Une des solutions, pour ceux qui sont parisiens, est de passer par une agence immobilière ouvertement ouverte aux LGBT, comme on en trouve dans le quartier du Marais.

Agences immobilières « gay friendly »

En sachant toutes les difficultés qu’une personne homosexuelle peut rencontrer au moment de louer un appartement, quelques agences immobilières se sont lancées dans le créneau, et proposent des offres « ouvertes à tous ».

Ce sont des agences sincères, dont les dirigeants sont souvent eux-mêmes gays. D’abord spécialisées dans le célèbre quartier du Marais, elles ont peu à peu élargi leur champ d’action dans toute la capitale. Leurs noms ne laissent aucun doute : La Garçonnière ou Arc-en-Ciel Immo en sont de beaux exemples. Leur multiplication ces dernières années montrent bien l’engouement actuel que suscitent les produits personnalisés, où les gays peuvent être en confiance.

Mieux vaut acheter que louer quand on est gay

La communauté gay a une très bonne réputation auprès des banques et leurs systèmes de notation. Un couple avec peu de chances d’avoir des enfants est très solvable, avec une forte capacité de remboursement.

Il est ainsi aujourd’hui plus facile pour un couple gay d’acheter à crédit son logement que de le louer. Pour ceux qui en ont les moyens, c’est la meilleure solution, il est préférable à nos yeux d’être propriétaire que locataire de son appartement. On évite les jugements du propriétaire, les remarques désobligeantes et l’homophobie ordinaire, tout en ayant son mot à dire lors des assemblées générales de copropriétaires.

En revanche, si on ne peut faire autrement que de louer, mieux vaut passer son chemin si on tombe sur un propriétaire homophobe. Si la victime en a le courage, elle peut porter plainte, mais est-ce que le jeu en vaut la chandelle ?

Article rédigé par

José a travaillé au marketing de grandes sociétés financières. Ceci lui a donné ses premiers contacts avec les difficultés que pouvaient rencontrer les demandeurs de crédit.