Faire un crédit après un fichage FICP et fichage interne

Ça y est, le plan de surendettement est enfin terminé, au bout de nombreuses années. Mais si c’est terminé, pourquoi est-ce que les banques refusent encore de faire un crédit ?
À jour le 29 septembre 2023

Beaucoup de personnes sont surprises de ne pas pouvoir faire un crédit juste après être sorties d’un plan de surendettement ou d’une procédure de rétablissement personnel. Il y a deux raisons majeures à cela : soit on n’a toujours pas assez de revenus pour faire un crédit, soit les banques ont gardé un très mauvais souvenir de notre dossier de surendettement. Mais alors, comment refaire un crédit ?

Toutes les fins de surendettement ne sont pas identiques, et le défichage du FICP, de l’interdiction de crédit, dépend de la façon dont le surendetté a été fiché et des solutions mises en œuvre pour sortir du surendettement par la commission de surendettement ou le juge de l’exécution. Avant de savoir pourquoi il est impossible de refaire un crédit après un FICP, il faut comprendre le fichage en lui-même, et surtout, le point de vue des créanciers, les banques qui ont prêté de l’argent, et leur fameux « fichage interne ».

Faire un crédit après une procédure de rétablissement personnel

La procédure de rétablissement personnelle est douloureuse : à la fois pour le surendetté qui n’aura plus rien suite à sa liquidation judiciaire, et pour les créanciers qui ne vont pas récupérer leur argent. L’effacement des dettes est sans doute la pire des solutions pour qui veut obtenir de nouveau un crédit un jour.

Si la vente des biens du surendetté permet de rembourser les créanciers, il n’y aura plus de fichage au FICP, toutes les dettes ayant été soldées. Les créanciers gardent le souvenir de quelqu’un qui aura eu des difficultés à rembourser, mais qui au final a pu s’acquitter de sa dette : ils n’auront pas perdu, ou très peu, d’argent.

Si la vente des biens du surendetté ne suffit pas à rembourser les créanciers, il sera effectivement fiché au FICP, le Fichier des Incidents de remboursement des Crédits aux Particuliers. Impossible de sortir du fichage avant 5 ans : en effet, pour ne plus être fiché, il faut rembourser ses dettes, mais comme elles ont été annulées, le surendetté ne pourra jamais les rembourser ! Les créanciers ont donc perdu beaucoup d’argent, qu’ils ne reverront jamais.

Un effacement partiel des dettes provoque aussi un fichage de 5 ans : même en remboursant les autres dettes par anticipation, les dettes « effacées », ne pouvant pas être remboursées, provoquent le fichage. Il ne sert donc à rien de rembourser les autres dettes en avance lorsque l’on a bénéficié d’un effacement partiel des dettes, il n’y aura pas de défichage.

Mettons-nous à la place du conseiller bancaire qui doit accorder un prêt à quelqu’un qui n’est plus FICP, mais qui avait bénéficié de l’effacement de dettes. Si le conseiller consulte la Banque de France pour savoir si la personne est fichée, il ne verra rien, pas d’inscription. Mais ce conseiller se souvient peut-être de ce client qui avait donné tant de problèmes ! Et s’il ne s’en souvient pas, sa banque (et toutes ses filiales) s’en souviendra pour lui : sa fiche client indique qu’il s’agit d’un profil très risqué.

Si le dossier de l’ancien surendetté est un peu juste pour accorder un crédit, pensez-vous que le conseiller prendra le moindre risque avec cette personne qui n’a jamais pu rembourser ses dettes par le passé ? Est-ce que vous prêteriez de l’argent à quelqu’un qui n’a jamais pu rembourser un prêt autrefois ? Il faudrait un très bon dossier de crédit pour que la personne surendettée passe le « crédit scoring », un calcul que la banque effectue pour savoir si ce n’est pas trop risqué de prêter de l’argent.

Le défichage est automatique : au bout de 5 ans, la Banque de France retire la personne surendettée du FICP. Quand une banque refuse d’emprunter parce que son client est encore fiché selon elle, c’est qu’il y a eu un souci. Il convient alors de vérifier auprès de la Banque de France qu’on a correctement été retiré du FICP. Même si la mise à jour du FICP est en « temps réel » et que les banques peuvent donc avoir immédiatement une réponse de la Banque de France, je conseille toutefois de ne pas être trop impatient, mieux vaut attendre un mois après la fin du fichage avant de demander un nouveau crédit, juste pour être sûr que toutes les bases de données sont bien mises à jour. De plus, je ne suis pas sûr que cette impatience à faire un nouveau crédit soit bien vue de la part du banquier…

Si la banque refuse toujours d’accorder un nouveau crédit, c’est le fichage interne de la banque qui pose donc problème. Vous trouverez à la fin de cet article comment je pense que l’on devrait faire pour améliorer ses chances d’obtenir un crédit.

Faire un crédit après un plan conventionnel de redressement

La situation de ceux qui ont obtenu un « plan conventionnel de redressement » est un peu plus simple que ceux qui ont bénéficié de l’effacement de dettes. Même si leur fichage est souvent plus long, jusqu’à 7 ans, ils auront au final réussi à rembourser tout ce qu’ils doivent, sans avoir été obligés de vendre leurs biens. Les créanciers n’en gardent pas un très bon souvenir, on l’imagine, mais ils ont été remboursés.

Leur fichage s’arrête lorsque le dernier créancier aura été remboursé. Il est même envisageable de rembourser par anticipation par rapport au plan de redressement, ce qui permet de sortir plus rapidement du fichage. Le défichage sera effectif lorsque la Banque de France aura reçu de la part des créanciers tous les justificatifs prouvant le bon remboursement intégral des dettes.

Mais, comme pour ceux qui ont eu l’effacement de dettes, ce n’est pas parce qu’on est plus FICP qu’on pourra à nouveau obtenir un crédit. Le fichage interne existe toujours ! Alors… comment faire ?

Sur le FICP, on y trouve les établissements ayant provoqué le fichage, le nombre de crédits et leur nature : crédit immobilier, crédit à la consommation… Le fichage n’est levé que lorsque le dernier créancier aura communiqué à la Banque de France le remboursement de la dette. Mais, on le souligne encore une fois, ce fichage à la Banque de France restera normalement dans le fichage interne de la banque de l’ancien surendetté.

Encore fiché alors que le FICP aurait dû être terminé

En premier lieu, il convient de vérifier soi-même ce fichage, en faisant une demande à la Banque de France. Pour le faire, on peut adresser un courrier accompagné d’une photocopie de sa carte d’identité ou aller soi-même à la succursale de la Banque de France la plus proche de chez soi, que l’on peut trouver ici : https://www.banque-france.fr/la-banque-de-france/nous-connaitre/implantations-de-la-banque .

Il se peut, à de rares occasions, que le fichage soit erroné : soit parce que la Banque de France n’a pas mis à jour son fichier (peu probable), soit parce que l’un des établissements qui avait provoqué le fichage n’a pas pris la peine d’informer la Banque de France du remboursement intégral de la dette (beaucoup plus probable) ou s’est trompé sur les informations transmises (comme Carrefour Banque par exemple, qui suite à un problème technique avait transmis de mauvaises dates).

Ici, pas de mystère : si on a tout remboursé, il faut réclamer par courrier auprès de l’établissement qui n’a pas encore informé la Banque de France. Si malgré tout, le fichage perdure, il faut soit recourir au médiateur de l’établissement bancaire, soit recourir à la CNIL, la Commission Nationale de l’Informatique et des Libertés (contact de la CNIL).

Pour trouver le médiateur de sa banque, on peut le demander à son conseiller bancaire, ou faire une recherche Google, en tapant « médiateur + nom de la banque ». Par exemple, si on est chez LCL, on tape « médiateur LCL », ce qui va renvoyer ce résultat : www.lcl.fr/mediation .

Le site du Service Public propose un modèle de lettre pour saisir le médiateur.

Si aucune demande n’aboutit, ni chez le médiateur, ni chez la CNIL, on peut toujours demander par courrier, en dernier recours, au « Gestionnaire des fichiers d’incidents » :

Banque de France –SFIPRP
Relations avec le Public
CS90000
86067 Poitiers cedex 9

Comment obtenir un crédit malgré le fichage interne des banques ?

Quand le défichage du FICP est vraiment effectif, on peut demander un crédit beaucoup plus sereinement. Pour ceux qui l’ignoraient, le FICP n’empêche pas légalement les banques d’octroyer un crédit si elles le souhaitent : en revanche, si l’emprunteur FICP qui a obtenu un crédit n’arrive pas à le rembourser, la banque risque très fortement de ne plus jamais revoir son argent. Autant dire qu’il est quasiment impossible d’avoir un prêt en étant interdit de crédit, sauf pour certains crédits liés à l’aide sociale : les banques ont horreur de risquer leur argent.

Attention : si on arrive à obtenir un crédit alors qu’on a un plan d’apurement de dette en cours, il faut en informer la commission de surendettement, qui donnera son accord ou pas. Il ne faut pas plaisanter avec son plan de redressement, et ne pas informer la commission pourrait provoquer la fin brutale de la procédure de surendettement, avec tout ce que cette déchéance impliquerait.

Malgré le défichage, la banque refuse toujours d’accorder un crédit.

Aucune banque n’est obligée de faire des crédits à des clients si elle ne le souhaite pas. Si un conseiller bancaire estime que le risque que représente le client ne vaut pas la peine de lui accorder un prêt, il ne le fera pas. Alors, que faire ?

On peut commencer par demander les raisons qui ont poussé la banque ou l’organisme de crédit à refuser le prêt. Leur réponse permettra d’améliorer son dossier de crédit pour faire une nouvelle demande de crédit, de préférence dans une autre banque.

Attention : les banques ne sont pas obligées de motiver leur refus ! Mais elles sont obligées de fournir à la demande les éléments du client présents dans leur fichier interne : il s’agit du « droit d’accès », issu de la Loi « informatique et libertés ». On pourra obtenir la note au crédit scoring (pour savoir si on était loin d’avoir le prêt ou pas), on pourra lire les annotations du conseiller et d’autres informations jugées pertinentes par l’établissement bancaire. Grâce à la Loi, en vérifiant les informations contenues dans la « liste noire » de la banque, on peut les rectifier : c’est le « droit de rectification ». La banque a un délai de deux mois pour fournir ces informations, après quoi, on peut saisir la CNIL.

En principe, les banques gardent pendant 6 mois les données en rapport avec un refus de crédit, pour empêcher le client débouté de faire une nouvelle demande dans une des autres établissements de crédit du groupe. Il s’agit pour la banque de ne pas perdre son temps à refaire une étude de dossier de crédit pour quelqu’un qui a déjà eu un refus. Après un premier refus, il faut donc attendre au moins 6 mois avant de faire une nouvelle demande de crédit auprès de sa banque ou l’une de ses filiales. Quand on arrête d’être client d’une banque, elle peut garder son fichage interne pendant 5 ans.

Pour améliorer ses chances d’avoir un crédit, tout est dans l’art d’améliorer son « score », sa notation en tant que client de l’organisme prêteur. Il s’agit d’avoir un bon apport, de demander peu d’argent emprunté, d’avoir de bons revenus, d’avoir une situation professionnelle et familiale stable et tous les critères qui peuvent rassurer une banque. Je vous l’explique plus longuement dans mon article « éviter les risques du crédit », avec quelques conseils pouvant aider à améliorer ses chances d’obtenir un crédit.

credit score et notes
Le score de crédit permet aux banques d’évaluer les risques qu’un client présente au moment de lui attribuer un prêt d’argent.

Ce n’est donc plus tellement une histoire de fichage interne, qui n’est qu’un des paramètres pris en compte par la banque avant de prêter de l’argent, mais surtout de cette fameuse « note » attribuée par la banque au moment d’accorder un prêt. Pour améliorer ses chances d’obtenir un crédit auprès d’une banque après un fichage désormais terminé, il faut y aller au cas par cas. Deux points sont à prendre en compte principalement : la relation du demandeur de crédit avec sa banque et le type de crédit demandé.

Il est clair que si on demande par exemple un crédit de 15000 euros avec une mensualité de 400 euros alors qu’on gagne en CDI 3000 euros, même après un fichage et une liquidation judiciaire, il ne devrait pas y avoir de difficulté à obtenir le prêt. Même chose si on a hérité d’un bien qui permet d’apporter une importante garantie de prêt.

Si on a une bonne relation avec sa banque, le conseiller financier peut-être très utile pour obtenir un crédit à la consommation : il connait la situation personnelle, les raisons du fichage et peut, s’il a confiance, prendre le risque d’octroyer un crédit auto par exemple. En revanche, il ne pourra pas grand-chose pour un crédit immobilier, ce n’est pas lui qui prend la décision mais généralement un service compétent qui étudie le dossier.

Si au contraire, la relation avec le conseiller est mauvaise, mieux vaut changer de banque, de préférence une banque qui ne partage pas ses informations internes avec l’établissement qui a provoqué le fichage. Si vous avez par exemple été fichés par Cetelem, n’allez pas ouvrir un compte en banque chez BNP Paribas, Cetelem étant leur filiale dédiée au crédit à la consommation ! Passez plutôt par un courtier : il peut guider son client vers une banque où il y a plus de chances d’obtenir un crédit.

La médiation : en cas de litige

Après avoir tout tenté pour obtenir un crédit, et si on est sûrs qu’il y a un problème injustifié, il ne faut pas hésiter à saisir le médiateur de sa banque, comme expliqué précédemment.

Pour les sociétés financières (Cetelem, Sofinco, Cofidis…), il faut saisir le médiateur de l’ASF (Association Française des Sociétés Financières), qui étudiera la question.

Dans les deux cas, je ne donne pas beaucoup d’espoir : même si rien ne cloche avec votre dossier, les sociétés de crédit ne sont pas obligées de faire un prêt ! Même pour des raisons clairement discriminatoires, dans le style « je ne prête pas aux arabes », elles ne seraient pas obligées. Mais dans ce dernier cas, on peut porter plainte pour discrimination et obtenir une condamnation.

Pour ma part, après un premier refus, je vais voir ailleurs. C’est plus simple.

Quoi t’étais surendetté et tu veux encore faire un crédit ?

Il faut avouer qu’on a souvent entendu cette phrase. Mais personne ne connait la situation personnelle de chacun, et ce crédit, après un surendettement, et peut-être le moyen de pouvoir enfin s’en sortir ! Il suffit de penser au crédit auto, qui permet de pouvoir enfin s’acheter une petite voiture pour aller chercher du travail, par exemple.

Fin 2016, il y avait en France 2,6 millions d’inscrits au FICP. C’est colossal, et c’est, même pour les banques, un fléau économique. Tout autant de gens qui ne peuvent plus investir dans leur avenir, tout autant d’intérêts que les banques ne touchent pas. Il ne faut pas croire que les sociétés financières soient heureuses de tous ces clients qui n’ont pas pu payer leur crédit, ou de toutes ces personnes qui ne seront plus des clientes.

Ce n’est pas par plaisir sadique si une banque ne prête plus à un ancien interdit bancaire, c’est pour sauvegarder ses propres intérêts. Le mieux, après avoir vérifié le fichage interne qui a provoqué le refus de crédit, c’est d’aller voir ailleurs, en tirant les leçons apprises du fichage interne. Inutile, à mon sens, de s’escrimer pendant des mois avec sa banque pour obtenir un crédit qu’elle n’est de toute façon pas obligée de donner.

Article rédigé par

José a travaillé au marketing de grandes sociétés financières. Ceci lui a donné ses premiers contacts avec les difficultés que pouvaient rencontrer les demandeurs de crédit.