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Face à l’ampleur qu’est en train de prendre le surendettement dans un contexte de crise économique, où les ménages ont de plus en plus de mal à rembourser leurs emprunts, le ministère de l’économie a décidé en 2010 d’adopter de nouvelles règles pour l’octroi du crédit, une Loi qui tente de protéger les consommateurs.
Loi sur le crédit
Malheureusement, la loi est trop timide, Christine Lagarde, notre ancienne ministre de l’économie, n’était pas allé assez loin. Cette « nouvelle loi » n’est autre qu’une transposition d’une directive européenne. Le Ministère de l’Economie aurait pu en profiter pour compléter et apporter quelque chose en plus, nous en avons d’ailleurs bien besoin.
La mesure qui aurait pu être la plus importante à mon sens de la nouvelle Loi aurait été la création d’un fichier central des emprunts, mais ça ne sera pas pour cette fois, c’est dommage.
On reste sur des bonnes intentions, avec des mesures qui vont sans doute aider un peu, mais qui ne s’attaquent pas au problème de fond : il est aujourd’hui relativement simple d’obtenir un crédit, même si on est déjà par ailleurs endetté jusqu’au cou, pour peu qu’on ne soit pas encore fiché à la Banque de France.
De l’autre coté, nous avions un projet de Loi du Parti Socialiste, qui demandait purement et simplement d’interdire le Crédit Revolving. Comme si cette forme de crédit était la principale source de tout les maux, comme si les agences de crédit n’allaient pas proposer des crédits similaires ou comme si les ménages qui de toute façon veulent à tout prix faire un crédit même quand le bon sens leur dit d’arrêter n’allaient pas le faire.
Nous allons décortiquer les différentes mesures de la Loi en vigueur depuis 2010, et vous parler également de ce qui se préparait au sujet de ce fameux Fichier Central des Prêts, la véritable solution à mon sens pour en finir avec la majorité des cas de surendettement et qui ne sera malheureusement jamais adopté.
Pour les plus pressés, une vidéo du Sénat, qui explique cette nouvelle Loi : http://videos.senat.fr/video.14646_57b41608498e9, avec Philippe Dominati de l’UMP et Nicole Bricq du PS.
Nouvelles règles du crédit
Les principales mesures de la réforme, telles que nous pouvons les lire sur le site du Ministère de l’Economie, avec ma petite traduction en dessous :
- Cartes de fidélité : interdiction de conditionner les avantages commerciaux à l’utilisation à crédit des cartes de fidélité et des cartes de paiement, dont la fonction crédit ne pourra plus être utilisée sans que le consommateur ait donné son accord exprès.
En clair : on ne sera plus obligés d’utiliser la réserve d’argent associée à la carte de fidélité des grands magasins. Peu de magasins le faisaient (je n’en connais pas, personnellement) : les gens n’auraient pas été fidélisées.
- Publicité : interdiction des mentions ambiguës et introduction d’une mention légale obligatoire sur toutes les publicités « un crédit vous engage et doit être remboursé. Vérifiez vos capacités de remboursement avant de vous engager »
En clair : comme pour les cigarettes, on vous rappelle qu’il faut faire attention avant de faire un crédit.
- Crédit renouvelable : chaque échéance de crédit renouvelable comprend obligatoirement un amortissement minimum du capital restant dû .
En clair : certains crédits revolvings étaient si mauvais pour le consommateur qu’on pouvait ne rembourser que les intérêts, en boucle : le crédit n’était jamais soldé. Désormais, quoiqu’il arrive, les crédits revolving seront soldés tôt ou tard.
- Crédit responsable : renforcer les obligations des prêteurs, notamment sur le lieu de vente, avec la création d’un devoir d’explication et d’une obligation de vérification de la solvabilité.
En clair : le gentil emprunteur va devoir vous dire qu’il faut faire attention avant de faire un emprunt, et vérifier que vous pouvez rembourser.
- Rachats de crédit : définition de règles spécifiques applicables aux opérations de rachats de crédits
En clair : il va falloir qu’on attende pour connaître la teneur de ces « règles spécifiques ».
- Délai de rétractation : porté de 7 à 14 jours
En clair : vous avez maintenant 14 jours pour changer d’avis.
- Commission bancaire : contrôle de la commercialisation des crédits.
En clair : les organismes de crédit seront contrôlés par une commission bancaire, qui va donc vérifier de la légalité des offres de crédit.
- Réforme de l’assurance emprunteur : plus de transparence sur le coût et de concurrence sur l’offre.
En clair : vous allez avoir de meilleures informations sur le prix de l’assurance que vous pouvez prendre pour un crédit. Par exemple, on vous dira combien coûte en euros et par mois l’assurance qu’on vous propose.
- Commissions de surendettement : 3 mois au lieu de 6 pour décider de la recevabilité des dossiers de surendettement, décision de rééchelonnements et effacements d’intérêts par les commissions
En clair : les commissions de surendettement seront plus efficaces et plus rapides. Une des nouveautés les plus appréciables au sujet des commissions de surendettement, c’est que désormais, les propriétaires de leur logement pourront également y avoir recours. Il était temps, il aurait été dommage de devoir vendre sa maison pour payer ses crédits : le logement est vital, et à moins d’avoir un logement de luxe, je trouve qu’il ne devrait pas rentrer en ligne de compte dans les biens à saisir si il faut rembourser une dette relativement petite vu le prix d’un appartement : vous trouvez normal vous, de devoir vendre votre logement de 100 000 euros pour rembourser une dette de 5000 ? Non ? Moi non plus.
- Fichier des incidents de paiement : modernisation du fonctionnement du fichier et réduction de la durée d’inscription pour faciliter le rebond des personnes connaissant des difficultés d’endettement
En clair : les fichiers des incidents de paiement seront mis à jour plus souvent (on entend parler d’une mise à jour quotidienne, contre 3 mois actuellement). De plus, le fichage durera moins de temps : 5 ans désormais, contre les 8 à 10 ans actuels.
Toutes ces mesures me semblent vraiment peu de choses face à l’ampleur du problème. Une des mesures les plus significatives, le « fichier positif », dans lequel sont inscrits tout vos crédits en cours, est en cours d’études de faisabilité. Il rendrait obsolète les fichiers des incidents de paiement.
Le fichier positif ou le fichier central des emprunteurs
Le fichier positif, qui inscrit tous les crédits d’une personne, permet aux banques et autres organismes prêteurs de connaître la situation du demandeur de crédit.
D’un seul coup d’œil, il devient très simple de voir si le demandeur de crédit n’a pas eu d’incident bancaire, s’il a toujours remboursé ses emprunts, s’il n’est pas déjà dans une situation de surendettement. Ce fichier donne une très bonne garantie sur le profil du demandeur de crédit.
Il devient d’un seul coup beaucoup plus aisé d’obtenir un crédit ! Actuellement, il est estimé que 40% de la population française n’a pas accès au crédit classique. C’est énorme, mais la France rechigne toujours à la création d’un tel fichier. Nous l’avons vu sur mon article dédié au fichier positif, la France est encore en train de débattre l’adoption éventuelle d’un tel fichier, devant faire face à la désinformation, au lobbying de certaines banques et à la peur de la perte de confidentialité…
Si la France venait enfin à créer un fichier central, dit « fichier positif », ça ne serait pas le premier pays à le faire. Ces fichiers existent déjà en Belgique depuis 2003, en Allemagne, en Italie et en Espagne.
Le projet de loi de la réforme du crédit à la consommation préparait la mise en place d’un tel fichier, une centrale des crédits aux particuliers, placée sous la responsabilité de la Banque de France. Une étude a été réalisée, qui a duré 3 ans à partir de la promulgation de la Loi. C’était, je trouve, assez lent, surtout à la vitesse où vont les choses. Nicole Bricq, sénatrice du PS de la Seine-et-Marne et vice présidente de la commission des finances du Sénat à l’époque proposait d’ailleurs la création de ce fichier, mais surtout d’un « crédit social », ouvert aux familles en général exclues du crédit, pour des montants allant jusqu’à 3000 euros. Le fichier positif, donnant l’assurance aux banques que vous pouvez effectivement rembourser vos emprunts, permet du coup de faciliter l’octroi de crédits : le microcrédit devient envisageable !
Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a jamais eu d’unanimité sur la création du fichier central, ni même entre les banques. Certaines banques préfèrent le fichier positif, estimant que ça les protégerait des futurs mauvais payeurs, d’autres sont contre, estimant que c’est un processus énorme qui compliquerait trop l’octroi des crédits. D’autres encore trouvent qu’un tel fichier est une atteinte aux libertés individuelles et à la privacité, surtout si le fichier peut servir à recevoir de la pub agressive. On les comprend quelque part, et c’est pour ça qu’il faut très bien penser le fichier central des emprunts.
l’UFC-Que choisir, association de consommateurs, est contre le fichier positif, justement à cause du manque de privacité de nos données : il donne accès au moindre établissement de crédit à notre salaire, nos revenus, nos dépenses, nos crédits, ce qui permet pratiquement à la Terre entière de nous ficher dans une case « consommateur » et lui envoyer des publicités, le solliciter pour acheter telle ou telle chose, tel ou tel service. Un enfer pour le consommateur : à cause de quelques personnes qui n’ont pas eu de chance dans la gestion de leurs finances, on fiche l’ensemble de la France.
C’est, en l’état, exagéré, et il faut bien sûr plusieurs garde-fous pour que cela n’arrive pas. L’association Cresus, qui assiste les ménages en banqueroute, est bien sûr pour, mais ils ne regardent le problème que par le prisme des surendettés. L’avis des établissements de crédit est également partagé : Cetelem est contre, la Banque Accord est pour.
On l’a compris, pour les ménages les plus fragiles, la Centrale des Crédits aux Particuliers, selon les termes de la Loi, est quelque chose de fondamental : elle protège les plus démunis, et leur permet d’accéder aux microcrédits. En revanche, pour la majorité des français, ce fichier central présente le risque, si il est mal fait, d’exposer les ménages à toutes les campagnes marketing abusives imaginables.
Faire baisser les taux d’intérêts grâce au fichier positif ?
On le voit, un « fichier central du risque », ou « fichier positif » possède beaucoup d’avantages. Il existe des entreprises et des associations qui ont tout intérêt à ce qu’un tel fichier existe. En premier lieu, les banques étrangères et autres organismes du crédit : elles auraient accès à un fichier qui leur permet de façon immédiate de cibler un demandeur de crédit, et d’accorder, ou pas, le crédit. Les banques françaises n’ont en général pas besoin du fichier positif : elles se sont constituées elles mêmes de tels fichiers en interne.
En effet, le paysage bancaire français est constitué de très peu de banques, qui ont la main sur la plupart des établissements financiers. Il est facile pour elles de déterminer un profil d’un demandeur de crédit, ne voyant pas d’un bon œil un fichier qui permettrait à la concurrence d’arriver sur leur chasse gardée, la France, avec pour conséquence immédiate, une baisse des taux d’intérêts, ce qui serait profitable pour tout le monde ! Hormis bien sûr les actionnaires des grandes banques françaises, comme le Crédit Agricole, BNP Paribas…
Proposition de l’Association Française des Usagers des Banques (AFUB)
Une solution, en attendant la venue tant attendue du fichier positif, est proposée par l’AFUB :
les banques, pour vérifier la solvabilité d’un futur client, seraient obligées désormais de demander les « trois derniers relevés mensuels du compte bancaire où sont crédités les ressources, salaires et traitements de l’usager ». Cette obligation donne beaucoup plus de sécurité aux banques, et est une bonne solution intermédiaire. Pour les plus gros crédits, c’est déjà le cas en pratique, même si on ne s’en rend pas forcément compte, vu que la majorité des crédits immobiliers sont réalisés dans notre propre banque, où nous avons notre compte courant.
Rendre le crédit plus facile à obtenir
Les personnes qui ont des difficultés bancaires ne peuvent plus prendre de crédit classique, mais il existe certaines solutions de financement, qui seraient encouragées par la création du fichier positif. L’objectif du microcrédit est de favoriser l’initiative personnelle des exclus du circuit bancaire traditionnel. Le microcrédit finance les projets de développement d’une entreprise, d’investissements qui permettent d’obtenir un revenu. On prête à quelqu’un qui va faire fructifier l’argent, et qui sera en état de rembourser. C’est sans aucun doute à mon avis la meilleure aide que l’on puisse faire à quelqu’un : on lui permet de se prendre en charge, on lui donne les moyens de se créer son propre revenu.
L’ADIE, microcrédit en France
L’ADIE, association pour le droit à l’initiative économique, fait des microcrédits en France pour les chômeurs, bénéficiaires du RSA et ainsi de suite, pour ceux qui justement veulent créer leur propre emploi. Mais l’ADIE, ne pouvant se baser sur les garanties habituelles des banques pour donner sa décision d’octroi de prêt, doit passer par d’autres critères que le classique CDI : le demandeur devra fournir beaucoup d’informations personnelles, passer des entretiens, avoir des personnes qui peuvent témoigner en votre faveur, voir qui se portent garantes ! Bref, chaque dossier fera l’objet d’une profonde étude, ce qui empêche l’ADIE de pouvoir octroyer de nombreux microcrédits. En tout cas, pas dans une proportion qui puisse véritablement faire la différence en France : 2100 microcrédits en Île de France pour l’année 2008. Le fichier positif permettrait à l’ADIE de simplifier l’octroi du crédit.
Pôle emploi et le microcrédit de l’ADIE
Il est bon de noter que Pôle emploi et l’ADIE vont proposer 10000 microcrédits personnels pour l’emploi pour les trois prochaines années. Expérimenté par l’ADIE depuis 2006, avec un plafond maximal de 3000 euros, ce microcrédit permet de financer un permis de conduire ou la réparation d’une voiture par exemple.
Toutes ces initiatives sont donc limitées par la difficulté à déterminer de la bonne foi et de la solvabilité du demandeur de crédit. L’ADIE pratique de plus un taux d’intérêts tout ce qu’il y a de plus normal, comme une banque classique : ce n’est pas de la charité.
Initiatives privées : PlanetFinance
PlanetFinance est une société de microfinance fondée par le bien connu Jacques Attali. Elle vient en aide aux différentes institutions de microfinance dans le monde, accordant des microcrédits qui permettent ainsi aux plus démunis d’avoir accès aux services financiers. En 2007, PlanetFinance a passé un accord avec Experian, afin de s’entraider pour promouvoir dans les différents pays où PlanetFinance travaille, le fichier positif. Nous l’avons vu, le fichier positif permet aux institutions financières d’obtenir des informations fiables sur les demandeurs de crédit, leur permettant d’accorder des crédits suivant le profil de chacun.
PlaNet Finance
C’est une initiative louable, je trouve. Nous savons bien qu’Experian, ni même PlanetFinance, sont des institutions de charité, mais c’est justement pour ça que ça marche ! Si tout le monde y gagne, le service est pérenne, de plus en plus de microcrédits sont accordés et de plus en plus de personnes pourront se donner les moyens de sortir de la misère, ou au moins, améliorer ses conditions de vie.
Projet de Registre National des Crédits
La création d’un fichier positif est fondamentale pour lutter contre le surendettement et responsabiliser définitivement les établissements de crédit. On a beau tourner le problème dans tous les sens, je ne vois pas pourquoi une banque ne pourrait pas connaître notre niveau d’endettement au moment de nous octroyer un crédit. Mais attention, uniquement à ce moment là !
Comité de préfiguration
Le comité crée à la promulgation de la loi est chargé de la remise du rapport sur la création d’un registre national des crédits. Un tel comité, composé de différents acteurs du crédit à la consommation, que ce soit des parlementaires, des associations de consommateurs, des organismes de crédit ou des banques, va donc étudier les modalités de mise en place du fichier positif, désormais appelé Registre National des Crédits.
Les règles de fonctionnement du fichier positif, du registre, sont donc à définir par le comité, et il est vital que ces règles protègent les droits des personnes. Le Registre National des Crédits sera placé sous la responsabilité de la Banque de France. Au sujet des associations, il suffit de savoir que l’UNAF, Union Nationale des Associations Familiales, demande à intégrer le comité de préfiguration, aux cotés de la CNIL (Commission Nationale Informatique et Liberté) par exemple. Ceci en dit long sur l’implication des associations dans la création du fichier, qui veilleront à protéger les intérêts de leurs associés. Un long débat en perspective entre tout ce petit monde, pour créer le meilleur rapport possible pour la création du registre national des crédits.
Associations de consommateurs
Lorsque l’on entend ou on lit dans les journaux que les associations de consommateurs sont contre la création d’un tel fichier, on voit donc que ce n’est pas exact. Les associations émettent surtout des réticences, et se montrent contre si le fichier positif est mal fait. La FBF, Fédération Bancaire Française est bien contre : le fichier positif ne sert pas les intérêts des deux principales banques françaises, qui ont déjà de tels fichiers en interne, en plus de pratiquer le crédit scoring. Nous parlons ici d’avantages concurrentiels très importants, ce que l’instauration du registre national des crédits va venir rendre plus équitable. Bref, tout le monde prêche sa paroisse, mais le véritable intérêt au final est de protéger les particuliers du surendettement, et de faciliter l’attribution du crédit, moteur de développement des économies occidentales.
Pour Christine Lagarde, « Ce ne sont pas moins de 9 millions de nos concitoyens qui utilisent le crédit à la consommation, 2,6 millions qui se trouvent en difficulté de remboursement et le nombre de surendettés, actuellement à 750.000 ménages, a augmenté d’environ 15 % entre septembre 2008 et septembre 2009 ».
Le tableau ci-dessous, élaboré par l’association de lutte contre le surendettement Crésus, fait un parallèle entre le niveau d’endettement par habitant dans certains pays ayant instauré le fichier positif et le montant moyen d’un dossier de surendettement.
Pays | Endettement par habitant en Euro | Montant moyen du dossier de surendettement en Euro | Ratio |
---|---|---|---|
Pays-Bas | 25 600 | 22 000 | 86 % |
Allemagne *Faillites civiles **Procédures de désendettement | 18 500 | 36 000 28.500 | 194 % 154% |
Belgique | 16 600 | 15 000 | 90 % |
France | 15 200 | 41 700 | 263 % |
La nouvelle Loi a été adoptée uniquement avec les votes de l’UMP et du Nouveau Centre, l’opposition ayant voté en bloc contre. En ce qui concerne le PS, c’est surtout pour protester contre une loi jugée peu ambitieuse, qui aurait du aller beaucoup plus loin. Il n’empêche, nombre d’associations reconnaissent que la réforme va dans le bon sens, regrettant, comme le PS, un manque d’ambition, comme l’interdiction des crédits renouvelables (ou crédits revolving) sur les lieux de vente, ou l’interdiction de coupler une carte de fidélité avec un crédit revolving.
Principe du Registre National des Crédits
Le fichier positif permet aux banques et autres organismes prêteurs de savoir quel est le niveau d’endettement d’un demandeur de crédit, quels sont ses crédits en cours. Ainsi, la société financière, la banque, peut avoir une véritable information fiable sur l’endettement des demandeurs de crédits, tant sur les montants que sur la durée. Ceci permet de sécuriser l’octroi des emprunts et éviter les fraudes, en plus de responsabiliser définitivement les sociétés de crédit. Les conditions d’accès aux informations du Registre National des Crédits seront déterminantes pour protéger les consommateurs, qui ne veulent pas se voir bombarder de publicités pour faire un crédit non sollicitées.
Experian
Experian est une société spécialisée en gestion du risque et lutte contre la fraude. En clair : elle créé et gère des fichiers positifs. Elle peut le faire à titre privé, pour le compte d’entreprises, ou à titre public, pour le compte de l’état, suivant des règles qui lui sont imposées par le demandeur du fichier. Experian a tout intérêt à ce que le fichier positif soit adopté en France : la société serait sans doute un partenaire de premier choix pour l’état français, au vu de son expertise technique et de son expérience.
J’ai pu parler longuement à un chargé des relations institutionnelles d’Experian, qui a gentiment répondu à toutes mes questions, et qui, bien sûr, a bien vendu son bout de gras 🙂
Experian est donc une société privée étrangère, implantée dans de nombreux pays, gérant déjà des fichiers positifs. C’est une question sensible que de donner des données sur les crédits de toute la population française à une société de droit privé, étrangère qui plus est. Même si les garanties légales sont données, il est toujours compliqué pour l’imaginaire collectif français de donner accès à ses données, d’où les difficultés rencontrées actuellement pour établir le fichier positif. Il faut savoir qu’actuellement, un projet d’étude du fichier positif par le sénat va durer 3 ans.
Il faut ensuite compter un an pour voter le projet de loi, puis encore un an ou deux pour enfin mettre en œuvre le fichier positif : nous avons donc, si on ne perd pas de temps, un délai de 5 à 6 ans minimum pour enfin voir un fichier central du risque en France, le fichier positif. C’est beaucoup trop long, nous parlons de 6 ans de surendettés supplémentaires ! Oui, je suis un peu démago, mais 6 ans pour mettre en place un fichier, pour plus compliqué qu’il soit, faut avouer que c’est beaucoup.
Il existe des alternatives à Experian, pour la mise en œuvre du fichier positif : la concurrence est là. La Banque de France elle-même est un concurrent, c’est déjà elle qui gère les FICP, FCC et ses autres fichiers.
Rejet du fichier positif
Le fichier positif n’a malheureusement jamais été adopté, contrairement à la volonté du porteur du projet, le ministre à l’époque Benoît Hamon. Il a été censuré en 2014 par le Conseil constitutionnel, au motif qu’on allait ficher trop de personnes pour sauver quelques personnes surendettées de faire la bêtise de trop. Un peu comme vouloir tuer une mouche avec l’arme atomique, en somme. Je ne suis bien sûr pas d’accord avec cette conclusion, tout dépendait de ce qu’on y met, dans ce fichier positif ! Voici ce que l’on peut lire sur la fiche repère de la Fédération Bancaire Française :
La conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale de décembre 2012 avait relancé le débat autour d’un registre national des crédits, dit » fichier positif « , dont l’objectif initial était de recenser tous les crédits d’un particulier. Le Gouvernement l’avait introduit dans la de loi sur la consommation votée en mars 2014. Son périmètre devait se concentrer sur les prêts à la consommation effectivement utilisés(1). Toutefois, dans une décision du 13 mars 2014 le Conseil constitutionnel a censuré sa mise en oeuvre jugeant que » la création du registre national des crédits aux particuliers porte une atteinte au droit au respect de la vie privée qui ne peut être regardée comme proportionnée au but poursuivi « .
Sa création avait été jusqu’ici écartée en France. Son efficacité reste toujours à démontrer pour lutter contre le surendettement lié aux accidents de la vie générant une baisse de ressources chez les ménages. Il ne prendrait pas en compte l’ensemble des dettes (fiscales, loyers, etc.), indicateurs réels de fragilité des ménages, ni même les ressources des clients.
Source : www.fbf.fr/fr/espace-presse/fiches-reperes/lutter-contre-le-surendettement
En matière de crédit, on retiendra de la Loi Hamon de 2014 la fin des renouvellements tacites de crédits renouvelables non-utilisés. C’est une protection supplémentaire pour le consommateur.
Le fichier positif, ce n’est pas pour demain.
Un fichier positif, où seraient inscrits tout nos crédits en cours, permet d’obtenir plus facilement un crédit et plus rapidement, tout en donnant l’accès au financements à une plus large partie de la population. La Loi Lagarde prévoyait la création d’un tel fichier, mais sa mise en place a été abandonnée.
La création d’un fichier positif aurait permis une plus grande concurrence entre les banques, mais aussi et surtout, un accès simplifié au microcrédit, en plus de l’objectif principal, la lutte contre le surendettement.