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La finance islamique est une finance éthique, qui empêche le musulman de faire des investissements contraires aux principes de l’Islam. Il n’y a pas d’investissements dans les entreprises d’armement, du jeu, de boissons ou d’élevage de porcs.
La finance islamique possède ainsi des limitations qui répondent de plus en plus aux préoccupations actuelles d’une responsabilisation de la finance.
Il ne faut pas oublier que les banques et surtout la spéculation sont responsables de la crise financière majeure des subprimes en 2008.
Finance islamique, hypocrite ?
La critique la plus souvent entendue au sujet de la finance islamique est son apparente hypocrisie : comme toute banque, les banques islamiques font des profits. Les épargnants sont rémunérés, comme dans une banque occidentale classique et les prêts d’argent ont un coût. En apparence, la finance islamique est identique. De plus, on a vu avec la crise de Dubaï : la spéculation immobilière à provoqué une immense dette de cet émirat de la péninsule arabique.
La finance islamique n’est peut-être pas si « responsable » que cela, si elle aussi est régie par les lois du profit et de la spéculation, alors que la spéculation est formellement interdite par l’Islam. Ce qui a provoqué la crise à Dubaï, pour faire court, ce n’est pas la Finance Islamique, mais la globalisation de la Finance : si les américains ne peuvent plus investir, acheter à Dubaï parce qu’ils sont la proie d’une crise sans précédent, le modèle économique de Dubaï qui reposait sur la vente d’immeubles aux américains s’effondre.
Sharia Board, Comité de Conformité Sharia
La finance islamique, pour pouvoir fonctionner, doit répondre aux préceptes de l’Islam. Chaque action de la banque est contrôlée par un « conseil des sages », la Sharia Board. Ces spécialistes de la religion, ces « Sharia Scholars », sont également d’éminents spécialistes de la finance et de la jurisprudence des affaires.
La dérive que nous avons pu voir au Dubaï n’est pas contraire à la Charia. Dubaï a lourdement investi dans l’immobilier, dans le tourisme, ce qui correspond à des biens matériels réels : un investissement qui apporterait la prospérité au Dubaï, qui n’a pas de réserves de pétrole comme ses voisins pour pouvoir prospérer. En revanche, dans un monde devenu global, la crise de l’immobilier américaine a touché tout le monde, y compris les dubaïotes : sans les étrangers pour investir au Dubaï, pour y acheter des biens immobiliers, les projets se retrouvent naturellement asphyxiés. La Finance Islamique n’est pas sans risque, au même titre que la finance conventionnelle.
Comment fonctionne la Finance Islamique ?
La Finance Islamique fonctionne, on a compris, en respectant l’Islam : elle a donc des limites, à ne pas franchir. Cette finance de contraintes, propres de l’investissement socialement responsable, repose sur cinq piliers fondamentaux, outre l’interdiction des financements d’activités « impures » :
- Interdiction de l’intérêt, le « ribâ », de l’usure. On ne rémunère pas le capital pour le capital, sans travail concret.
- Interdiction de la spéculation, « gharar » et du hasard, « massir ». L’incertitude trop importante est bannie des échanges financiers, on ne joue pas au casino !
- Adossement des actifs aux transactions financières. Il y aura donc toujours un bien tangible dans chaque transaction.
- Partage des pertes et des profits, du risque. C’est la relation qu’il y a entre un acheteur et un vendeur, plutôt que la relation qu’il y a entre un débiteur et un créancier : la banque achète un bien, qu’elle revend à son client.
- Le dernier pilier est l’équité et la justice, au service de l’homme. L’objectif de la Finance Islamique est que ses profits servent le plus grand nombre, plutôt qu’une poignée de riches.
Ces principes sont à mon sens parfaitement responsables, et on pourrait les généraliser à l’ensemble de la finance mondiale. Faire en sorte que ce soit l’économie du concret, du réel qui bénéfice de la Finance, plutôt que la spéculation boursière, où l’on peut gagner de l’argent, même si les valeurs des actions chutent ! C’est du bon sens, sans invoquer la religion, avec un rôle positif qui donne une piste sur comment on pourrait faire pour réguler la finance mondiale.
La finance islamique joue par ailleurs déjà un rôle prépondérant dans le microcrédit dans les pays en voie de développement. Les principes du microcrédit sont en accord avec les principes musulmans, où la finance sert à venir en aide à ceux qui veulent investir.
Le modèle islamique date des années 70, mais s’est accéléré depuis le milieu des années 90. Un franc succès a été rencontré d’abord dans les pays du golfe persique et la Malaisie, et est en train de suivre le même chemin en Afrique du Nord. C’est somme toute assez récent, et cette finance est un peu victime de son succès, avec ses pêchés de jeunesse. Il existe par exemple un manque vital d’experts, de jurisconsultes pour former des comités de conformité à la Charia. Il existe un manque d’expérience des milieux financiers, qui permet de se prémunir de certains pièges. C’est en ce sens que certains disent que la finance islamique est opaque, avec un manque de transparence dans la gestion : les structures ne sont pas encore rodées.
Crédit auto halal
L’Islam n’interdit pas l’achat et la revente avec marge d’un bien. C’est le principe même du commerce. La banque islamique va donc profiter de cet état de fait, et pratiquer quelque chose qui est finalement assez proche du leasing, ou crédit-bail : elle achète la voiture que le client veut, en son nom, et la revend immédiatement au client. Le client lui, va rembourser la banque par tranches, avec la marge convenue à l’avance. Il n’y a donc pas, dans ce système, de taux d’intérêt variable. Nous sommes d’accord, dans la pratique, nous avons un produit financier qui est identique à un prêt affecté avec un taux d’intérêt fixe, nommé Mourabaha. Le crédit-bail, lui, est identique à l’ijara. Mais c’est justement ça qui est important : le « crédit » est adossé à bien tangible, la voiture, et il n’y a pas de spéculation ou d’aléa dans la transaction : l’emprunteur sait exactement ce qu’il va rembourser à l’avance. Un crédit hallal, c’est du crédit éthique, ce qui est exactement ce que la Finance Islamique veut promouvoir.
Pour en savoir plus sur les fondamentaux, je vous conseille de regarder cette vidéo sur Youtube avec Anass Patel, chercheur en finance Islamique.
Banque Islamique
Si vous entrez dans une banque Islamique, par exemple Al Rayan Bank, première banque islamique d’Europe, ou la Banque Zitouna en Tunisie, vous y trouverez tout ce qui fait une banque classique. Les mêmes produits, les mêmes services : financement auto, financement immobilier, carte de paiement, et même de l’épargne avec un « taux » de 3,5% maximum, ce qui est plutôt pas mal pour une banque de détail de nos jours.
Ce qui différencie cette banque d’une autre, c’est qu’elle est « hallal » : conforme à la religion. Un musulman pourra donc y investir les yeux fermés, rassuré par la présence d’une Sharia Board.
Il existe tout de même certains détails révélateurs : vous ne trouverez pas dans une banque islamique de carte de crédit. Ces cartes pratiquant l’intérêt, elles sont bannies, au profit des cartes de débit simples. De même, vous ne pourrez pas être à découvert ! On vous oblige en quelque sorte à être « responsable ». Des produits comme le crédit renouvelable sont donc impensables en finance islamique. Pour l’anecdote, le Parti Socialiste en France est contre les aménagements de Loi que Christine Lagarde est en train de faire pour accueillir la Finance Islamique en France, mais est pour l’interdiction du crédit renouvelable. Vous avez dit incohérence et opportunisme politique ?
Produits financiers islamiques
Les principaux produits financiers islamiques permettent d’avoir un financement adapté à chaque situation.
- Soukouk : ce sont des obligations, l’intérêt est transformé en profit, prévu à l’avance, et pratiquement sans risque. Très utilisé pour les financements immobiliers.
- Moudharaba : permet à un promoteur de mener à bien un projet, grâce à des fonds d’investissements. La répartition des gains et des pertes est établie dans le contrat.
- Mourabaha : c’est un contrat de vente, tout simplement. La banque achète le bien que son client désire, et le revend immédiatement au client, à un prix majoré, remboursable en tranches. La somme à rembourser est donc parfaitement connue d’avance.
- Ijara : c’est le crédit-bail islamique. La banque achète le bien, et le loue au client.
La Banque Islamique est ouverte à tous, il n’est pas nécessaire d’être de confession musulmane pour y ouvrir un compte ou demander un financement. La Banque Islamique n’est finalement qu’un moyen de s’assurer que notre argent est utilisé de manière responsable, comme n’importe quel financement éthique, qui doit répondre à des contraintes précises.
Financement Islamique en France
Il existe un double intérêt pour la venue de la finance islamique en France. Le premier intérêt, le plus visible, est de donner accès à la banque et ses produits financiers aux musulmans pratiquants, préoccupés par le caractère haram ou hallal des crédits et de l’épargne.
Le deuxième intérêt est plus vénal : il faut attirer les liquidités des pays producteurs de pétrole, leur investissement. Ils ont l’argent, nous avons les entreprises où ils peuvent appliquer cet argent. C’est un échange sain pour les deux parties, on m’a toujours dit que le début de la paix entre deux peuples, c’est quand ils commencent à faire des affaires ensemble 🙂
Opposition au financement Islamique
L’argument principal, essentiel, et carrément unique contre la finance islamique est celui de la laïcité. On est contre la finance islamique en France, parce qu’il faut modifier une Loi pour qu’elle puisse exister sur le territoire national.
On a peur de perdre le caractère laïc, la séparation de la religion et de l’état, en modifiant cette Loi. On a peur peut-être de perdre nos valeurs républicaines, en acceptant de nous plier au joug d’une religion.
Personnellement, j’y vois principalement une ignorance de ce qu’est la finance islamique. Sous couvert de la sacro-sainte laïcité, de cet intégrisme, on empêche des musulmans d’investir, de prospérer. En quoi empêcher une double imposition injuste sur un mécanisme financier nouveau est-il contraire aux principes de la laïcité ? On aurait tout aussi bien pu interdire d’autres mécanismes financiers sous contraintes d’exister !
Aujourd’hui en France, le mot « religion » fait peur. Pour rappel, l’état a été séparé de la religion, principalement pour donner la liberté de culte et sans entrave à tout un chacun, et pour séparer définitivement les choses temporelles, le pouvoir, de ce qui relève de l’esprit, des croyances personnelles, justement pour garantir que les croyances de toute le monde seront respectées.
Ici, on foule au pied une partie de la population, sans aucun gain pour les non musulmans. Adapter une loi afin d’accueillir la finance islamique n’est, techniquement, pas plus choquant que de changer la largeur des pistes des aéroports pour accueillir l’A380.
Il existe ensuite un argument, que j’ai du mal à comprendre : on estime que la présence d’un comité de conformité islamique est contraire au principe de laïcité. Sans doute, mais nous parlons ici de banques privées ! Je préfère, personnellement, savoir, même en tant que catholique, qu’il existe un conseil de conformité dans ma banque, qui veille sur les investissements suivant des principes auxquels j’adhère (par exemple ne pas financer l’industrie de l’armement), que de laisser libre cours à l’imagination fertile des traders en matière d’investissements douteux.
Mais évidemment, je parle en tant que simple blogueur, non spécialiste éminent. Pour vous faire une idée par vous-même, je mets ici une vidéo de Oumma TV, avec un débat entre Anouar Hassoune, qui est pour la finance islamique, et Pascal Hilout, membre du site « Riposte Laïque ».
Crédit immobilier halal pour musulman en France ?
Aujourd’hui, un musulman voulant respecter au pied de la lettre la Charia ne peut pas faire de crédit immobilier ! Il existe bien une fatwa expliquant que, sous certaines conditions, il pourrait faire un crédit immobilier, mais c’est un vaste sujet polémique et non accepté par d’autres experts religieux. Pour être sûrs, mieux vaut ne pas faire de crédit immobilier, ce qui condamne le croyant à être locataire, en attendant d’avoir épargné suffisamment pour acheter au comptant son logement.
Ceci va changer, et la finance islamique arrive en France, nul doute possible. Les modifications de la Loi ne sont que purement « techniques », il n’y a pas de remise en cause de la laïcité, comme certains agitateurs aiment dresser en épouvantail. Nous ne parlons que d’arrangements fiscaux pour éviter une double taxation (imaginer payer deux fois les frais de notaire !), qui rendent actuellement impraticable la finance islamique en France.
Il faut savoir toutefois que les banques françaises proposent déjà des produits financiers islamiques, dans les pays à majorité musulmane dans lesquelles elles sont implantées, sans que ceci ne gêne personne. Le savoir-faire des banques est donc là.
Il existe actuellement une formation spécialisée en Finance Islamique, un master de niveau 2 à l’Université Paris-Dauphine. Le diplôme forme des experts, acteurs confrontés aux problématiques pointues de ce type de finance. Ce n’est plus qu’une question de temps avant d’avoir enfin, en France, un crédit hallal 🙂 Le Sénat y travaille activement, comme on peut le voir sur la page dédiée à la finance islamique.
La finance à l’occidentale est « haram », un interdit de la religion musulmane.
L’Islam, comme la religion catholique par le passé, interdit le prêt d’argent avec des intérêts. Il existe en France de nombreux musulmans, soucieux de respecter leur religion. l’Islam étant la deuxième religion du pays. Mais malgré le nombre, il n’existe pas en France de produits financiers adaptés à l’Islam, et de façon plus large, à l’éthique musulmane.
Ceci est un réel problème pour les musulmans de France, qui ne peuvent pas investir leur argent ou demander un crédit sans aller contre les principes de l’Islam. Un musulman croyant voulant respecter les préceptes de sa religion fait souvent face à l’impossibilité de se financer sans heurter ses convictions religieuses. La Finance Islamique se développe de plus en plus, permettant à de nombreuses personnes d’enfin obtenir le crédit pour acheter leur maison.