Prêt entre particuliers : Younited Credit (Prêt d’Union), en questions / réponses

Entretien avec Thomas Beylot, co-fondateur de Younited Credit, le crédit sans les banques, qui a gentiment répondu à toutes nos questions.

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Younited Credit, autrefois Prêt d'Union, prêt entre particuliers

Younited Credit, anciennement Prêt d’Union, est une société proposant aux particuliers de se prêter de l’argent entre eux, évitant ainsi les intermédiaires que sont les banques. Dans notre article sur le prêt entre particuliers, nous disons qu’il s’agit d’un des composants de  ce qu’on appelle la « finance participative », avec le crowdfunding (« financement par la foule ») ou le microcrédit solidaire.

Le prêt entre particuliers aujourd’hui

Il existe une demande de plus en plus forte pour les prêts entre particuliers. Avec la crise et la défiance vis-à-vis des banques, ce mouvement s’est amplifié ces dernières années. La plupart des demandes de crédit entre particuliers sont faites par des personnes qui n’ont plus accès au circuit bancaire traditionnel. Ce sont les interdits bancaires, qui ont été fichées à la Banque de France, ce sont les gens trop pauvres pour qu’une banque leur accorde un crédit. D’autres veulent tout simplement s’affranchir des banques, pensant qu’en évitant cet intermédiaire entre les personnes qui veulent épargner et celles qui veulent emprunter, elles peuvent avoir un taux plus favorable, un crédit moins cher.

Younited Credit s’adresse aux personnes qui veulent éviter de passer par une banque pour prêter ou emprunter de l’argent. Le fonctionnement est simple : en mutualisant les fonds des personnes disposées à prêter selon le principe du crowfunding, Prêt d’Union peut financer les demandes de crédit des particuliers tout en minimisant les risques.

En avril 2016, Prêt d’Union, fort de son succès, se lance à l’international. Pour cela, l’entreprise change de nom : c’est désormais Younited Credit. Je trouve, de mon avis personnel, que cette nouvelle marque ne sonne absolument pas bien en France. Mais il faut parfois faire des sacrifices lorsque l’on souhaite proposer ses services dans d’autres pays. Mais… c’est quand même moche en français!

Entretien avec Thomas Beylot, l’un des quatre fondateurs de la société.

site internet de younited credit
Younited Credit travaille uniquement sur Internet

Prêt d’Union et les exclus bancaires

eK : La majorité des personnes qui recherchent un prêt entre particuliers sont des personnes exclues du circuit bancaire classique, à qui les banques ne veulent pas prêter. Prêt d’Union, qui se positionne sur le crédit entre particuliers, ne prête pourtant pas aux personnes fichées à la Banque de France. Quel est alors votre public?

T.B. : Prêt d’Union est une alternative au système bancaire traditionnel pour les particuliers qui aujourd’hui sont acceptés par les banques et autres organismes de crédit traditionnels qui leur sont affiliés.

Nous travaillons néanmoins pour proposer une solution au plus grand nombre d’internautes. Ainsi en septembre dernier nous avons mis en place un système de contre-proposition en ligne : si la demande de l’internaute a peu de chance d’aboutir en raison des informations partagées dans le tunnel de souscription en ligne, nous proposons directement (dans le tunnel) à celui-ci une solution pour laquelle l’acceptation est quasi-certaine.

Nous souhaitons in fine aboutir à une solution qui regrouperait à la fois la force des établissements bancaires traditionnels (le conseil, la flexibilité… même si c’est de moins en moins vrai) et celle des établissements de crédit en ligne (la rapidité d’exécution, la disponibilité).

Critères pour obtenir un « crédit entre particuliers »

eK : Les critères pour obtenir un crédit sont, selon votre site, encore plus « fermes » que ceux des banques traditionnelles (je cite: « une sélection des Emprunteurs aussi stricte voire plus stricte que celle des établissements de crédits »). Ne faisant pas partie d’un groupe bancaire, et n’ayant pas accès à leurs fichiers, comment faites-vous pour établir la réelle solvabilité d’un demandeur et ainsi minimiser les risques de défaut?

T.B. : la solvabilité d’une personne se mesure à l’aune de deux évaluations : d’une part sa capacité à rembourser le crédit demandé à l’instant de la demande, et d’autre part sa capacité à tenir ce taux d’endettement tout au long de son crédit.

Pour avoir une idée précise de la situation du demandeur sur ces deux critères, nous disposons de plusieurs outils. En tant qu’établissement de crédit agréé par la Banque de France, nous avons par exemple accès aux fichiers « négatifs » que sont le Fichier national des Incidents de remboursement de Crédits aux Particuliers (FICP) ou le Fichier Central des Chèques (FCC).

Plus spécifiquement, pour accepter une demande de financement Prêt d’Union réclame plus de justificatifs que les autres établissements de crédit. Par exemple, nous demandons systématiquement pour chaque demande les 2 derniers mois de relevés bancaire. Leur analyse nous permet de vérifier les informations saisies en ligne et d’être plus fin sur l’analyse du profil du demandeur.

Les 2 premières années d’activité nous permettent d’avancer sereinement : les cas de défauts de paiement sont en effet inférieurs aux prévisions, ce qui nous permet d’afficher un rendement supérieur à ce que nous annoncions aux investisseurs. Ainsi sur les crédits d’une durée de 5 ans, alors que nous annoncions un impact du défaut des paiements de 1% (sur un rendement brut à 5.5%) nous observons au 5 novembre 2013 un impact à 0.70% !

eK : quelle est votre position face au « registre national des crédits aux particuliers » ?

T.B. : le fichier positif faisait partie du « plan pauvreté » annoncé par Benoit Hamon en début d’année. A cette occasion, nous avions d’ailleurs reçu le ministre délégué à l’économie sociale et solidaire (cf le compte rendu de Prêt d’Union sur l’annonce du fichier positif).

En tant qu’acteur indépendant, Prêt d’Union est évidemment pour la mise en place du fichier positif. Parce que d’une part ce système (qui a fait ses preuves par exemple en Belgique) permet de prévenir le surendettement, et d’autre part, ce système permettra à de nouveaux entrants (comme Prêt d’Union) d’être encore meilleur sur leur modèle de risque !

eK : pensez-vous évoluer dans vos critères d’attribution de crédit, afin d’inclure une population qui aujourd’hui est privée de crédit? Un peu comme le microcrédit de l’ADIE par exemple, où les critères en question sont plutôt basés sur les chances d’un projet d’aboutir favorablement.

T.B. : l’évolution du modèle de risque est une des priorités de Prêt d’Union en effet. Néanmoins, il faut réfléchir aux différentes manières de le faire. Notre priorité première est de valider notre modèle de financement (sans intermédiaire, entre particuliers, de façon mutualisée) avec des critères d’attribution « standards ».

Assurance emprunteur pour les particuliers et sécurité du crédit

eK : allez-vous proposer une assurance emprunteur, du moins pour les sommes importantes? Par ailleurs, êtes-vous adhérant de la convention AERAS?
T.B. : nous sommes inscrits au registre de l’ORIAS (organisme pour le registre des intermédiaires en assurance) et proposons avec notre solution de crédit une offre d’assurance emprunteur (celle du groupe METLIFE), ceci pour tous les montants.

eK : le prêt entre particuliers est une cible de choix pour les « arnaques au crédit (article eKonomia)», un réel fléau mal compris encore en France. Est-ce que Prêt d’Union est confronté au problème?

T.B. : en effet, devant l’urgence de financement et le manque de solutions qui s’offrent à lui, l’emprunteur fait parfois appel à des particuliers « inconnus », notamment sur internet. Le principe de l’escroquerie est simple : souvent, le « prêteur » réclame des frais à l’emprunteur pour pouvoir lui livrer des fonds. L’emprunteur s’exécute, mais ne reçoit jamais les dits fonds en retour…

D’une part, le système de Prêt d’Union empêche ce genre d’arnaque. L’emprunteur ne doit JAMAIS avancer de fonds pour obtenir son prêt. D’autre part, à aucun moment les prêteurs n’ont de contact direct avec les emprunteurs : Prêt d’Union fait office de tiers de confiance entre les deux communautés. Nous analysons le profil des emprunteurs pour nous assurer de leur capacité de remboursement, mais de l’autre côté, chaque prêteur est passé au peigne fin, au titre de la lutte contre le blanchiment de l’argent par exemple.

Il faut garder en tête que si Prêt d’Union propose un modèle de financement alternatif, nous sommes soumis aux lois qui régissent le secteur bancaire. A ce titre, nous avons un devoir de contrôle de nos clients, ce afin de garantir le maximum de sécurité à nos emprunteurs et prêteurs.

Prêt d’Union en chiffres

eK : parlons statistiques: quel est votre pourcentage de refus d’octroi de crédit, et pour quelles raisons?

T.B. : sur 100 dossiers complets reçus de demandes de crédit, nous acceptons in fine 25 dossiers. Il y a plusieurs étapes clés : à chacune d’entre elles (présélection en ligne, retour du dossier, acceptation des dossiers reçus), nous filtrons une partie des demandes.

eK : clarifions les intérêts: fixes ou variables, sur Prêt d’Union?

T.B. : fixes. Prêt d’Union est le seul organisme de crédit en ligne à ne pas distribuer de crédit renouvelable. Alors que les établissements de crédit se rémunèrent grassement grâce à ce type de crédit, c’est là un choix fort que d’avoir décidé de ne pas proposer ce type d’offre « vicieuse » à nos internautes. Par ailleurs, les intérêts que payent les emprunteurs sont directement et intégralement reversés aux prêteurs de la plateforme.

Blog de Younited Credit
Blog de Younited Credit

eK : quels types de projets financez-vous?

T.B. : c’est assez varié. On a une partie non négligeable d’emprunt pour des travaux simples (30%), des véhicules (20%), voyages (5%), évènements particuliers (3%) mais aussi une section « trésorerie » (40%) qui regroupe pour la plupart des projets « hybrides » (voyage-impôts, ou travaux-études des enfants, etc.). Le montant moyen du crédit contracté chez Prêt d’Union est de 10 000€, il s’agit vraiment de projets « de vie » plus que des besoins « consuméristes » (pour lesquels souvent les banques proposent des crédits renouvelables).

Le futur du prêt entre particuliers chez Prêt d’Union

eK : envisagez-vous de faire du rachat de crédit?

T.B. : pas pour l’instant. La gestion du rachat de crédit demande en effet plus de travail opérationnel et réclame d’autres compétences.

eK : de quelle somme auriez-vous besoin pour pouvoir prêter à tous les demandeurs solvables qui passent par votre site?

T.B. : nous n’avons jusqu’à présent pas connu de problème de collecte et avons donc pu financer toutes les demandes validées par notre département acceptation. En octobre 2013 nous avons à titre d’exemple financé pour plus de 5 millions d’euros de projets.

eK : la fermeture de Friendsclear a été une perte pour le petite monde du « financement participatif ». La raison évoquée fut les complications imposées par le règlement strict et mouvant de l’ACP. Quelles sont les garanties que Prêt d’Union sera encore actif dans deux ans?

T.B. : contrairement à Friendsclear, Prêt d’Union a obtenu l’agrément d’établissement de crédit et prestataire de services d’investissement auprès de la Banque de France. En effet, notre système unique de mutualisation des prêts (notamment) est un gage de sécurité que la Banque de France a apprécié. Nous sommes donc du point de vue « légal » tout à fait conforme.

eK : Friendsclear, lors de sa fermeture, a pu rediriger ses clients vers son partenaire bancaire, le Crédit Agricole. Vers qui seront redirigés les clients de Prêt d’Union en cas de fermeture?

T.B. : Prêt d’Union n’a aucun raison de fermer pour des raisons réglementaires car avant notre lancement nous avons obtenu un agrément d’établissement de crédit de la Banque de France – c’est le même agrément que Cetelem, Sofinco, Cofinoga, Cofidis… donc aucun risque de ce côté-là !

eK : avez-vous des projets d’internationalisation, et de rejoindre Renaud Laplanche et son Lending Club aux Etats-Unis par exemple? Pourrions-nous envisager d’avoir des investisseurs étrangers qui financeraient des demandes de crédit françaises?

T.B. : nous n’avons pas le projet de rejoindre Renaud Laplanche. Lui-même par ailleurs n’a pas la moindre velléité d’internationalisation à moyen-termes : le marché des Etats-Unis est déjà un sacré challenge en soit. Nous réfléchissons à plusieurs opportunités de long terme (internationalisation, ouverture de nouveaux produits comme le financement des TPE/PME…). Tous nos efforts sont à ce jour concentrés sur le marché français.

Fonctionnement de Prêt d’Union

eK : Prêt d’Union, contrairement à d’autres plateformes de crowdfunding, comme indiegogo.com par exemple, ne permet pas aux investisseurs de choisir un projet en particulier. Nous sommes presque dans un schéma de banque classique, tout est anonyme, avec des investisseurs uniquement intéressés par la rentabilité. Est-ce que Prêt d’Union, dont le nom suggère une grande participation de tous, envisage d’évoluer vers une plus grande lisibilité des projets financés?

Effectivement la plupart si ce n’est la quasi-totalité des plateformes de crowdfunding propose de choisir le projet avant d’investir. Si cette façon de faire est très « communautaire », elle est aussi très risquée. On l’a vu avec des plateformes comme Lending Club, qui petit à petit passe de ce modèle en « one to one » ou « one to few » à un modèle qui tend au « all to all ».

Pour permettre au plus grand nombre d’emprunteurs d’obtenir un emprunt, il est essentiel de pouvoir compter sur le soutien d’un grand nombre de prêteurs. Si le produit financier que nous proposons n’intégrait pas le principe de mutualisation (qui tend à sécuriser le placement) alors nous serions dans l’incapacité de financer autant de crédits. A titre d’exemple, sur le marché français uniquement, Prêt d’Union en l’espace de moins de 2 ans c’est 50 millions d’euros de crédits financés.

Avec la taille critique suffisante nous pourrons néanmoins à long-terme proposer de donner une « couleur » à son portefeuille d’investissement. Pour l’instant, nous nous concentrons sur l’idée motrice de Prêt d’Union : financer l’économie réelle en bénéficiant d’un produit dont le couple rendement/risque est intéressant !

eK : Prêt d’Union se dit « plateforme de prêt entre particuliers », mais exige des investisseurs qu’ils aient le statut de « professionnel », du fait du risque plus élevé d’un tel investissement. Est-ce qu’un jour Prêt d’Union pourra s’ouvrir à plus d’investisseurs?

T.B. : l’AMF (Autorité des Marchés Financiers) nous a effectivement imposé cette contrainte à notre lancement. En effet, le produit d’investissement proposé (comme pour toutes les plateformes de finance participative) n’est pas à capital garanti donc dispose d’une part de risque, et c’est pour cela que nous ne nous adressons qu’à des particuliers « avertis » (ie qui comprennent parfaitement les tenants et aboutissants du produit) – les plateformes américaines comme Lending Club, Prosper ou AngelsList sont d’ailleurs exactement dans le même cas. Nous espérons à termes convaincre les autorités de la pertinence du modèle pour « ouvrir » le produit à un plus grand nombre.

 eK : pensez-vous pouvoir obtenir le label Finansol, ou autre label de l’investissement socialement responsable?

T.B. : nous avons récemment commencé les discussions avec eux.

eK : quelle est votre relation avec votre actionnaire Crédit Mutuel? Ont-ils leur mot à dire? Apportent-t-ils des moyens techniques, une connaissance?

Crédit Mutuel Arkéa nous apporte leur expérience/expertise du secteur bancaire, mais nous sommes tout à fait libres dans le management stratégique de Prêt d’Union.

Crédit moins cher avec Prêt d’Union ?

eK : selon nextbanq, Prêt d’Union n’est pas systématiquement l’offre la moins chère pour le demandeur. Comment est-ce possible? A l’avenir, si les organismes de crédit ont une politique très agressive avec des taux d’intérêt encore plus bas, ne craignez-vous pas de ne plus être pertinents?

T.B. : Prêt d’Union n’est pas systématiquement l’offre la moins chère pour tous les montants de crédits (en effet les établissements de crédits peuvent ponctuellement lancer des offres promotionnelles). Ceci étant, dans la grande majorité des cas, nous proposons une solution moins chère que celle de nos concurrents.

Maintenant, il faut faire très attention au moment de comparer les solutions de crédit. En effet, on observe actuellement une course au taux le plus bas, mais dans le même temps les établissements de crédit resserrent les conditions d’accès au crédit. L’évaluation d’une offre de crédit se fait à l’aune de son coût mais aussi de la cible à laquelle elle s’adresse ! Si à son lancement Prêt d’Union affichait un modèle d’acceptation plus contraignant que celui de ses concurrents, ce n’est aujourd’hui plus le cas. Certains de nos concurrents sont même bien plus contraignants que nous.

Ceci étant dit, vous me direz qu’alors il est impossible de comparer des solutions entre elles. C’est de ce constat que Prêt d’Union part pour refondre l’expérience client proposée actuellement. La contre-proposition est une première pierre (cf première question). L’idée étant de proposer à chacun une offre de crédit. Les établissements de crédit se concentrent sur le super-prime (comme les banques), soit. Tout en continuant de proposer une offre excellente à cette cible, nous allons aussi proposer des offres aux populations solvables qui sont peu à peu elles aussi exclues du système bancaire. « Une offre de crédit pour tous, avec un taux adapté à chaque profil ».

Younited Credit propose des prêts entre particuliers

Younited Credit, avec des actionnaires comme le Crédit Mutuel Arkéa ou le groupe Schibsted (LeBonCoin.fr, 20 minutes…), est en pleine croissance. Cette croissance est la preuve de l’intérêt toujours plus grandissant pour ce nouveau type de financement.

En se passant des banques traditionnelles, grâce à une stratégie minimisant les coûts (pas d’agence physique, tout se passe sur Internet) et en réduisant le risque au maximum, Prêt d’Union propose un service différent mais tout aussi efficace. C’est, on le pense, une façon de s’affranchir des requins de la finance et de collaborer avec une entreprise qui veut revenir aux fondamentaux du crédit : prêter de l’argent pour réaliser des projets, loin de la spéculation financière et des produits bancaires dangereux.

Article rédigé par

José a travaillé au marketing de grandes sociétés financières. Ceci lui a donné ses premiers contacts avec les difficultés que pouvaient rencontrer les demandeurs de crédit.


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